[Ce texte reprend des extraits du livre Agir pour un Monde Durable, paru en juin 2022 aux éditions Jouvence. Il a été rédigé par Pascale Fressoz, présidente de AIODD, et Corentin Biteau, vice-président France]

 

Plusieurs articles ici ont pointé du doigt qu’il est extrêmement difficile d’agir pour un monde durable tant que l’attrait de la consommation, de la poursuite de statut ou des distractions reste si fort.

Comme le rapporte Dennis Meadows, co-auteur du rapport Les Limites de la croissance, il y a deux façons d’être heureux: avoir plus ou vouloir moins. Comme avoir toujours plus n’est pas durable, et conduit à la destruction écologique, il va s’agir de vouloir moins. Apprendre à se satisfaire de l’essentiel sera donc une qualité indispensable pour avoir un futur désirable. Mais comment faire?

Après l’hygiène physique, l’hygiène mentale

« Le secret du bonheur, voyez-vous, n’est pas trouvé dans la recherche du plus, mais en développant la capacité à jouir de moins. » – Socrate

La piste d’action que nous allons présenter ici rejoint celle des sagesses les plus anciennes : mettre plus de conscience dans nos actions. D’après Matthieu Ricard, interprète du Dalaï-Lama : « Nous déployons beaucoup d’efforts pour améliorer les conditions extérieures de notre existence, mais en fin de compte c’est toujours notre esprit qui fait l’expérience du monde et la traduit sous forme de bien-être ou de souffrance. Si nous transformons notre façon de percevoir les choses, nous transformons notre qualité de vie. Et ce changement résulte d’un entraînement de l’esprit que l’on appelle ‘méditation’. »[2]

Quel rapport avec les ODD? L’intérêt est double: d’abord, améliorer l’ODD 3, associé à la santé, avec la santé mentale. Ensuite, parce qu’améliorer son propre bien-être permet de mieux aider les autres de façon  à atteindre les ODD, comme discuté dans cet article.

L’expérience du grain de raisin

Alors, en quoi cela consiste-t-il ? Faisons cette l’expérience proposée dans Le Bug Humain de Sébastien Bohler: « Prenez un grain de raisin sec. Simplement, au lieu de plonger votre main dans le sachet et d’y piocher une large poignée pour l’enfourner aussitôt dans votre gosier, saisissez-vous délicatement d’un unique grain, un petit grain ratatiné, entre le pouce et l’index. Regardez-le attentivement, de très près.

Examinez ses contours, ses plis et ses creux, sa teinte brunâtre, presque dorée. Même petit, il est riche de mille détails. Cela vaut la peine de l’observer, l’attention ouverte, presque avec étonnement. Puis, approchez ce grain de vos narines. Sentez-vous cette odeur sucrée, à peine acidulée, si caractéristique ? Prenez le temps de vous laisser pénétrer par cette senteur. Vous pouvez aussi constater la légère salivation qui se produit dans votre cavité buccale. En quelques instants, vous venez de prendre conscience d’une foule de détails.

Maintenant que vous avez observé et humé attentivement votre petit grain de raisin, mettez-le dans votre bouche. Mais ne le mâchez pas. Sentez son contact sur votre langue, et les petites décharges gustatives que cela provoque, sans même l’ingérer. Faites-le passer, du bout de votre langue, entre vos lèvres et vos dents. Sur son sillage, une saveur sucrée s’étire. Des picotements acidulés se dégagent. Essayez à présent de le faire glisser vers l’arrière de votre bouche, entre vos molaires. Testez sa résistance et sa texture. Commencez à en exprimer le suc, à en détailler la saveur. Ramollie, sa peau s’ouvre et laisse émerger sa pulpe condensée. C’est immense, ce qu’il y a dans un grain de raisin. »

Les bienfaits insoupsçonnés de la méditation

Notre perception et notre appréciation des choses dépend du degré de conscience qu’on leur accorde. Chaque situation recèle une foule de détails dont on n’a même pas idée la plupart du temps. Un même objet peut être complètement ignoré ou nous émerveiller pendant 10 minutes. Un aspect intéressant est que ces méditations calment l’esprit et nous entraînent à observer sans juger, sans être pressé, sans vouloir continuellement faire autre chose.

Les effets de cette pratique sont soulignés dans de nombreuses études scientifiques qui montrent des bienfaits précieux pour la santé physique et mentale (ODD 3)[3] :

  • Diminution des cycles dépressifs
  • Amélioration du bien-être mental et émotionnel
  • Baisse des ruminations anxieuses
  • Amélioration des fonctions cardiaques
  • Elévation des défenses immunitaires
  • Meilleure résistance à la douleur

D’après une étude de The Lancet[4], une thérapie basée sur la méditation pleine conscience est une alternative aussi efficace que les antidépresseurs dans la prévention des rechutes dépressives. Elle n’est cependant pas adaptée à ceux dont l’égo est altéré par un trauma ou une psychose. Mais de manière générale, cette pratique permet de faire baisser le stress et d’activer les zones du cerveau liées à la bienveillance, l’empathie et la bonne humeur : tous les outils dont nous avons besoin pour agir dans le bon sens ! Bien sûr, cela demande de l’entraînement et une certaine rigueur : c’est une pratique régulière et quotidienne (quelques minutes), qui donne des effets. La généralisation de cette pratique (écoles…) dans les écoles pourrait avoir des impacts impressionnants.

Quelques ressources pour s’y mettre

Comment s’y mettre, alors? Le livre de Matthieu Ricard, l’Art de la Méditation, donne des méthodes pour franchir le pas. Comme il le formule, « Nous déployons beaucoup d’efforts pour améliorer les conditions extérieures de notre existence, mais en fin de compte c’est toujours notre esprit qui fait l’expérience du monde et la traduit sous forme de bien-être ou de souffrance. Si nous transformons notre façon de percevoir les choses, nous transformons notre qualité de notre vie. Et ce changement résulte d’un entraînement de l’esprit que l’on appelle ‘méditation’ ».

On peut également citer Le petit guide de la Méditation en Pleine Conscience, d’Elizabeth Couzon, très axé pratique. Si vous parlez anglais, l’application Waking Up est une ressource de qualité, alternant pratique et théorie. En français, les méditations de Christophe André sont également inspirantes.

D’autres livres, bien que n’étant pas axé méditation, fournissent également des clés utiles. On peut citer Les 4 Accords Toltèques de Don Miguel Ruiz, qui décrit les fausses croyances que l’on accumule tous au fil du temps, par exemple le fait de se considérer toujours « pas assez bien ». Il propose 4 méthodes pour se libérer de ces croyances. Changez vos pensées, changez votre vie de W. Dyer contient également des clés pertinentes et une autre vision de voir le monde (même si moins axé pratique).​

Après un peu de pratique, il peut être envisageable de faire une retraite de méditation, dont l’intérêt est de donner un cadre adapté pour apprendre les techniques correctement. Une de ces retraites, qui m’a personnellement énormément apporté, est la retraite Vipassana – pas nécessairement facile mais extrêmement instructive, combinant enseignements pratiques et théoriques.

Le livre ​L’Art de Vivre, de William Hart, fournit un excellent aperçu de la philosophie derrière cette méthode, qui explique l’importance d’un mode de vie éthique pour avoir un esprit plus apaisé. Ces enseignements sont inspirés du Bouddhisme, mais non religieux. On y est enjoint à ne pas croire sur parole tout ce qui est dit, mais à les expérimenter par soi-même, car les connaissances théoriques sont insuffisantes pour améliorer son esprit: c’est la pratique qui marche. Ils donnent un éclairage précieux pour comprendre l’origine de la souffrance (qu’elle émerge sous forme d’anxiété, stress, frustration…), et comment changer son rapport aux choses et à nos pensées de façon de manière constructive. Un aperçu de ces enseignements est présent ici : https://www.dhamma.org/fr/about/art.

 

Une autre façon plus visuelle de présenter l’intérêt de la méditation a également été décrite dans cette vidéo:

Pour aller plus loin, l’article suivant fait le lien entre ce qui compte pour notre bien-être et sur l’action concrète: Et si agir pour la planète était compatible avec notre propre bonheur?

Vous pouvez en savoir plus dans le livre complet, Agir pour un Monde Durable.

Facebook
Twitter
Instagram